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dimanche 22 février 2015

Sacré dimanche !


 C'est dimanche.
                    Je n'irai pas chez Leclerc, ni à Bricorama.
                               Juste chez mon boulanger...
  Le dimanche, par (bonne) tradition, c'est un jour à part.
   Mister Macron a cédé devant les lobbies des grandes surfaces et des grands magasins des beaux quartiers parisiens. Par cette mesure, rien ne changera au problème de l'emploi.
                    Les Juifs ont depuis longtemps leur Sabbat, mais bien avant les Assyriens ménageaient un jour sacré .
     La tradition chrétienne reprit à son compte cette tradition jusqu'à la rigueur la plus absolue:
                      En 1693, un décret stipulait:
« Nous défendons à tous les marchands d'exercer leurs commerces aux jours de fêtes et de dimanches et de tenir des foires et marchés soit pour vendre soit pour acheter. Nous défendons aussi à tous les artisans d'exercer leurs arts et métiers auxdits jours comme barbiers, maréchaux, cabaretiers, chartiers, voituriers et autres. Nous exceptons toutefois les cas d'évidente nécessité dans lesquels il est permis de vendre certaines marchandises comme pain, vin, cidre, viande et à certains artisans d'exercer leurs arts et auxdits jours comme à des chirurgiens et apothicaires, boulangers, rôtisseurs, bouchers pendant les chaleurs de l'été ; maréchaux, charrons, charpentiers pour secourir les équipages de ceux qui se trouvent en voyage, dans des besoins pressants et inopinés : les chartiers pour empêcher la perte des biens de la terre après avoir pris la permission de leur curé, le tout néanmoins hors le temps du service divin autant qu'il se pourra.___Nous ordonnons aux curés, vicaires et à tous les autres confesseurs de refuser l'absolution aux marchands et artisans qui contreviendront au présent statut. Nous exhortons les seigneurs, magistrats et juges des lieux d'employer leur autorité pour empêcher la tenue des foires et marchés aux saints jours et pour les faire transférer à d'autres jours et empêcher les artisans de faire lesdits jours l'exercice de leurs arts et exécuter en cela les ordonnances de nos rois qui les défendent » (Statuts synodaux du diocèse d'Avranches, 1693, cité par A. Cabantous).
           Puis,le recul du christianisme aidant, l'anticléricalisme progressant, il y eu beaucoup de dérogations et d'entorses. Mais il faut attendre une loi du 13 juillet 1906 et pas moins de 43 articles du Code du travail pour que le dimanche redevienne (sauf exception) un jour de congé obligatoire et garanti. Sans en avoir sans doute conscience, les syndicats ouvriers adoptent la même ligne que les évêques d'antan (voir plus haut les statuts synodaux d'Avranches).
Les dérogations sont, il est vrai, nombreuses, depuis les hôpitaux jusqu'aux restaurants, en passant par les entreprises de spectacles... Ajoutons à la liste, depuis 1993, les magasins spécialisés dans la culture, puis les zones commerciales et les zones touristiques etc etc. De leur côté, les commerces de détail alimentaire gagnent le dimanche le droit d'ouvrir jusqu’à midi, voire 13h aujourd'hui.
Comme au Moyen Âge, le dimanche chômé retrouve sa vocation de marqueur social et culturel.
      Puis vient la banalisation du dimanche.
[*Robert Beck, Histoire du dimanche : de 1700 à nos jours, Bayard presse, 1997.
*Alain Cabantous, Le Dimanche, une histoire. Europe occidentale (160-1830), éd. Seuil, 2013
*Daniel Perron, Histoire du repos dominical : un jour pour faire société, éd. L'Harmattan, 2010.]
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________Le point de vue de J.Savès:
 Le travail du dimanche fausse la concurrence et détruit les emplois.  Le travail dominical ? Un désastre pour l'emploi et une atteinte gravissime à la « concurrence libre et non faussée ». Rien de moins. Vous trouvez le propos un peu fort ? Il faut qu'il le soit pour briser le dogme officiel. Le débat sur le repos dominical n'arrive pas par hasard. Il intervient alors que les six géants français de la grande distribution ont entrepris d'investir les centres urbains. Hécatombe chez les commerçants indépendants. Frappés par le lent déclin de leurs hypermarchés, Carrefour, Leclerc, Intermarché, Casino, Auchan et Système U tentent de rebondir en multipliant les supérettes en centre-ville : Carrefour City, Monop, Simply Market etc  Le problème est que les petits commerces indépendants font de la résistance.
   Les géants de la grande distribution se sont donc entendus pour éliminer les épiciers,
bouchers, charcutiers, boulangers, pâtissiers et autres marchands de primeurs. Même les pharmaciens et les libraires sont dans leur collimateur : déjà les supermarchés Monoprix se dotent d'un rayon presse.
   La banalisation du dimanche est l'arme de destruction massive qui leur permettra d'atteindre leur objectif sans coup férir, en usant de l'égarement de l'opinion par les médias et les politiciens.
  Comment cela se peut-il ? Simple comme bonjour. Dès lors que se multiplieront les ouvertures dominicales, attendons-nous à ce que les citoyens, par facilité, reportent au dimanche une bonne partie de leurs courses habituelles. C'est normal, c'est humain :« J'ai encore du travail au bureau ?... Tant pis, je rentrerai plus tard et je ferai les courses dimanche ! »
  Cette plaisante facilité est sans commune mesure avec le désastre social qui résultera de la banalisation du dimanche, quand elle arrivera à son terme, après la loi Macron.....
  ... Les géants de la grande distribution et le ministre de l'Économie avancent à petits pas, afin d'accoutumer l'opinion à leur projet, avec à chaque fois des justifications qui ont l'apparence du bon sens. Ainsi, nous dit-on, les commerçants seraient d'ores et déjà soumis à la concurrence d'internet avec la possibilité d'acheter en ligne 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Oui, sauf qu'on est livré deux ou trois jours après... Commandez un livre le dimanche et vous le recevrez mardi au plus tôt. Mieux vaut attendre le lundi pour l'acheter en librairie et emporter en même temps le sourire de la caissière !Et les touristes chinois ? Y pensons-nous aux touristes chinois et à leur magot ? Mais bien sûr : les commerces de luxe n'ont pas attendu la loi Macron pour s'adapter à leurs exigences. Ne faut-il rien faire de plus ? Bien au contraire... Nous proposons de réfléchir au travail dominical en nous conformant strictement à une formule prisée par ses promoteurs néolibéraux : la « concurrence libre et non faussée » ! Cela signifie une législation simple et universelle, qui s'applique à toutes les entreprises sans distinction de secteur, de lieu ou de taille, qui respecte le droit des salariés et satisfait aux attentes de tous les citoyens en leur double qualité de consommateurs et de travailleurs..."
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