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jeudi 15 mai 2014

Europe: nouvelle donne?

 Redessine-moi une Europe...
                                         En ces temps de campagne molle et morose, l'Europe ne fait plus rêver.
            Des tensions, masquées jusqu'ici, se  manifestent publiquement. Des lignes de fractures se font jour.
     Sur tout l'échiquier politique, on trouve des personnes ou des groupes  mobilisés pour une critique des dysfonctionnement de l'Europe, issus de Maastricht et de Lisbonne, et de sa manière de gérer la crise, révélatrice de vices de forme profonds. L'entêtement néolibéral des élites ne laisse pas entrevoir de nouvelles perspectives. Roosevelt ne les a pas inspirés.
          Erik Wesselius, candidat du Parti socialiste néerlandais va droit au but: « Le budget actuel de l'Union est trop élevé, les dépenses sont mal maîtrisées et de l'argent est gaspillé. La charge est mal répartie entre les pays. Les aides financières apportées à la Grèce et à d'autres ont surtout bénéficié à des banques allemandes ou françaises, sans résoudre le problème de l'endettement. Il faut que les Parlements exercent davantage de contrôle sur la politique. Sur le long terme, déficits et dettes doivent être comblés, mais s'en tenir  strictement à la norme des 3 % prive les Etats de la nécessaire flexibilité pour réagir à des événements économiques. Les Etats doivent aussi préserver leurs compétences en matière de santé, de retraites, d'emploi, de logement, de transports  publics, etc. L'Europe actuelle est d'abord celle des multinationales, des grandes entreprises et des banques. Elle doit être redessinée, rendue plus moderne, plus flexible, moins centralisée. »
       Pendant ce temps-là, les ayatollahs bruxellois non élus s'enferment dans un aveuglement entêté.
  Les pontes du PS escamotent les débats de fond, faisant dans l'incantation habituelle, eurobéats comme toujours, contre une majorité souvent plus critique.
          Mais le très modéré Terra Nova, think tank d'obédience libéral-socialiste, pointe pour une fois les dégâts du consensus de Bruxelles      (Allusion au  Consensus de Washington...qui a longtemps imposé sa logique)
               "... Les auteurs... rappellent... les dégâts considérables engendrés par l’aveuglement économique qui a frappé de Bruxelles à Berlin, en passant par Paris : « La trajectoire suivie par la zone euro est pire que celle connue par les pays européens lors de la Grande Dépression. (…) La Grèce a subi un cataclysme qui ne peut se comparer qu’à la chute de moitié du PIB de la Russie qui a suivi la chute de l’Union soviétique. » Au niveau de l’Union, les résultats  sont pitoyables : à partir de 2010, les salaires réels ont baissé dans 18 Etats sur 27 alors que dans la seule zone euro on compte 7,7 millions de chômeurs, dont 3,5 millions sont directement imputables à l’application de la doctrine bruxelloise. Contrairement au « récit » des multiples think tanks néolibéraux adeptes de l’adage « no pain, no gain » (pas d’efforts, pas de bénéfices), « la souffrance des Européens n’était ni nécessaire ni vertueuse. Elle était évitable et néfaste ».
                       Si ces prises de conscience parfois tardives, parfois opportunistes, ne restent pas seulement verbales,   une issue possible pourrait se dessiner, si l'on va résolument à contre-sens de la logique libérale dans laquelle l'Europe s'est enfermée.
                                 Certains, aux projets encore flous, veulent donner un nouveau souffle pour l'Europe.
            Ce qui est nouveau c'est que des  eurocrates critiques prônent aussi une mise à plat:
"... Des voix critiques s'élèvent, depuis le cœur même de la « machine » européenne, pour une autre Europe. Les fonctionnaires européens ne seraient pas aussi moutonniers et dociles qu'on les imagine souvent, depuis la France. Dans un appel que Mediapart publie en exclusivité (il est ici), un collectif de jeunes fonctionnaires, conseillers et diplomates, estime qu'« une autre voie est possible » pour l'Europe, cinquante propositions à l'appui. 
      Ils sont originaires de différents pays de l'Union, sont trentenaires – pour la plupart d'entre eux – et travaillent au sein des institutions (parlement, conseil, commission, BCE) ou encore de représentations nationales auprès de l'Union (les services diplomatiques de chaque capitale à Bruxelles). Tous considèrent que l'on ne débat pas assez de l'Europe, à deux semaines d'élections décisives pour l'avenir de l'UE. La difficulté d'organiser un débat sur le sujet à une heure de grande écoute sur une chaîne de télé française les atterre. Ils ont donc choisi de s'investir davantage dans la campagne. Un site, en plusieurs langues, vient d'être ouvert, afin de relayer l'appel et de mettre en débat leurs cinquante propositions pour repenser le « contrat social européen ».
« L'Europe n'est pas à la hauteur de ses promesses », reconnaissent d'emblée ces « eurocrates critiques », qui ont choisi de conserver l'anonymat. Le constat qu'ils dressent de l'Union n'est pas reluisant, et tranche avec les discours officiels relayés à longueur de journée par les services de communication des institutions bruxelloises : « Un cercle vicieux s'est installé entre un déficit exécutif empêchant l'Europe d'agir et un déficit démocratique, qui produit chaque jour plus de rejet et de tension. L'intégration européenne risque de ne plus être soutenue par les peuples, appauvris et tentés par le repli national, voire nationaliste. 
... En fin d'année dernière, des universitaires allemands, proches de la CDU et du SPD (les deux partis au pouvoir en Allemagne), connus sous le nom du « groupe de Glienicke », avaient déjà publié un texte allant dans cette direction, jugeant qu'« aucune des crises qui sous-tendent celle de l'euro n'est résolue, ni de près, ni de loin », et s'inquiétant de « la radicalisation du spectre politique » dans les pays en crise.
     Une initiative symétrique, côté français, orchestrée notamment par l'eurodéputée Sylvie Goulard, a vu le jour en début d'année, sous le nom de « groupe Eiffel ». Des universitaires et journalistes français (Thomas Piketty, Pierre Rosanvallon, Xavier Timbeau, Guillaume Duval, etc.) ont quant à eux publié en février un manifeste pour une union politique de l'euro, partant du principe que « rien ne serait plus faux que de s'imaginer que le plus dur est derrière nous ». 
    Toutes ces initiatives, restées plus ou moins confidentielles, partagent une analyse forte : la crise que traverse l'Union n'est pas seulement économique, mais elle touche aux fondements mêmes de son projet politique (voir les passages en force de la « Troïka », ou le durcissement du régime hongrois). L'appel du groupe Euro2030 est toutefois un peu différent. D'abord parce qu'il émane du cœur de la machine bruxelloise – la démarche est rare. Ensuite parce qu'il veut aller plus loin qu'une simple déclaration politique, et avance des propositions très précises, y compris sur le terrain social, pour sortir du statu quo actuel..."
      Contre-feux produits par la crainte de résultats électoraux catastrophiques ou amorce d'un véritable tournant?
                              On ne tardera pas à le savoir. 
  Cessons d'avoir honte de remettre sur ses pieds une Europe qui marche sur la tête. 
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- Banquiers et autorités n’ont pas tiré les leçons de la crise
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