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dimanche 30 mai 2010

Martine à l'heure anglaise

Do you care ?

Yes we care !

Un remède à la souffrance sociale?
__Soigner les plaies ou traiter les causes?
-Une société plus douce ou plus juste ? ou plus douce parce que plus juste?

-Après "Désir d'avenir",une formule magique en l'absence de vrai projet, après le déclin?
Un
"artifice de communication"?(JL Bianco)

-Le "care"(difficilement traduisible en français): une notion riche de sens, féconde pour certains, intéressante dans ses dimensions philosophiques, contestée par d'autres au sein du PS.
Vraiment adaptée aux valeurs républicaines?
Une sorte de
néo-blairisme flou, avec des accents reaganiens compassionnels?
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Querelle de mots ou divergences politiques?
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"Martine Aubry parle d'une société du "soin mutuel". L'idée, je crois, c'est que la crise de confiance qui traverse notre pays est une crise du lien social et de la réciprocité. Pour dire les choses autrement, il existe un désir de donner et une crainte de ne pas recevoir"
. Il poursuit : "Plus fondamentalement, ce qui me paraît fécond dans ce concept, c'est la volonté de promouvoir une société plus douce par rapport à celle, très dure, qu'incarne Nicolas Sarkozy, qui semble dire au plus grand nombre : "I don't care"[ce n'est pas mes affaires] ! (...) Le care, à l'inverse, c'est le souci des autres contre le seul souci de soi, c'est la société des égaux contre la folie des egos. Ce que dit Martine Aubry, c'est : "Yes, we care !"(GF)
____-Jack Lang préfère « Yes we can »
Décrétant que ses propos battent un "record de banalités et de poncifs au cm²", le journaliste de RTL, Jean-Michel Aphatie, décerne à l’ancienne ministre de l’Emploi et de la Solidarité, un "prix de nunucherie".
Il est vrai que la proposition de Martine Aubry a suscité des prises de position passionnées, aussi bien à droite que à gauche.
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Manuel Valls, le député-maire d'Evry, déclare au journal Le Monde que "cette intention, si noble soit-elle, est une erreur profonde et constitue même un recul pour la gauche et pour le pays". Il considère que c'est une "vieille idée des années 1980" qui "n'est en rien adaptée à la société française d'aujourd'hui dont le modèle de l'Etat providence est à bout de souffle".
De son côté, Jack Lang, interrogé par Le Parisien Dimanche/Aujourd'hui commente :
"quitte à reprendre un terme anglo-saxon, je préfère le "yes we can", plus volontaire, au "yes we care", au goût un peu compassionnel ".
___Dans une tribune au Monde également,
Nathalie Kosciusko-Morizet, la secrétaire d'Etat à l'économie numérique répond à Martine Aubry au nom de l’UMP. Elle insiste sur l’angle féministe : "Rien de nouveau sous le soleil, sinon le retour à un discours de l'assistanat social et des bons sentiments, dont je doute qu'il rende justice aux femmes". Le concept est selon elle dépassé car "il enferme les femmes et la réflexion politique dans la seule considération de la souffrance sociale"
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-Mais que veut Martine Aubry?
-La gauche que veut Martine Aubry
:
"...Je crois que nous avons à l'évidence sous-estimé les conséquences du bouleversement du monde du travail et notamment la montée de la précarité et des travailleurs pauvres. Nous n'avons pas réussi à recréer le lien entre les jeunes et la société, dans laquelle ils peinaient de plus en plus à trouver leur place. Et de manière plus globale, c'est l'éclatement même de la société que nous n'avons pas suffisamment pris en compte.
Mais il faut aussi porter beaucoup plus loin l'analyse: le 21 avril, c'est déjà loin, huit ans ont passé depuis. _______Aujourd'hui, il y a d'autres problèmes lourds qui se sont ajoutés comme la dévalorisation du travail, la mainmise de la finance sur l'économie, le repli sur soi...Des replâtrages ne suffiront pas. Le système libéral financier actuel est devenu tellement inefficace et socialement inacceptable, qu'il oblige à repenser un nouveau système fondé sur des valeurs. On ne peut plus donner l'impression de suivre le cours du temps, sous couvert de modernité..
Je pense qu'il faut réguler fortement les marchés. Des outils existent pour remettre la finance au service de l'économie réelle.

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Séparons par exemple les banques de dépôt et les banques d'affaires et imposons à celles-ci des règles prudentielles pour éviter la spéculation financière. Ou créons un fonds d'intervention public, pouvant accompagner les PME ou soutenir l'innovation. Fixons des taux différenciés d'impôt sur les sociétés, moins élevés pour les profits réinvestis dans l'économie que pour ceux redistribués aux actionnaires... Les travaillistes anglais agissent en ce sens en ce moment: ils créent une nouvelle tranche d'impôt, ils taxent les bonus et les stock-options. La fiscalité reste un instrument majeur pour agir sur la société.
__Il faut réarmer l'Etat dans son action et aussi idéologiquement, au sens plein du terme. Je le redis: le prochain rendez-vous avec les Français se jouera sur les valeurs....
__Une évolution fondamentale est le passage du matérialisme et du «tout-avoir» à une société du bien-être. Il faut pour cela se reposer les questions essentielles. Que produire? Comment produire? Comment distribuer?
__Que produire? Quelle part de ses richesses la nation doit-elle consacrer aux biens communs, comme la santé, le logement et l'éducation? C'est de cela dont nous devons débattre avec les Français. Cela demande de redéfinir ce qui dépend de la puissance publique et ce qui relève du rôle du marché, mais aussi de promouvoir une économie verte et durable, une agriculture raisonnée et responsable, des services ouverts et accessibles à tous, notamment via les nouvelles technologies... C'est presque une nouvelle révolution industrielle que l'on doit mener, où l'Etat doit intervenir dans le marché...."


-La "société du care" de Martine Aubry fait débat:

"...Cette "société du bien-être", du "soin" ou du "care" ("soin" en anglais) va devenir le socle de la réflexion de Martine Aubry. Le "care" est en fait une notion de philosophie anglo-saxonne (David Hume et Adam Smith notamment) qui se centre sur les interactions empathiques, sur le souci de l'autre. L'idée a été modernisée par le mouvement féministe américain des années 1960, devenant une forme de "moralité des femmes", une éthique particulière développée notamment par Carol Gilligan.[Un "care" qui n'a rien de communautariste]
Cette figure du féminisme américain postulait une vision proprement féminine de l'éthique et des rapports sociaux, centrée autour de la notion de prendre soin des autres, qu'elle souhaitait enseigner à l'ensemble de la société et aux hommes. Ses travaux ont inspiré ceux de Joan Tronto, une autre universitaire américaine, qui a modernisé la notion dans Un monde vulnérable, pour une politique du care, paru en 1993. Martine Aubry s'inspire visiblement de cet ouvrage lorsqu'elle résume sa vision du "care" comme un "autre modèle de développement économique, social et durable, mais aussi un autre rapport des individus entre eux". (Lire "Martine Aubry cherche à redynamiser la pensée sociale progressiste".)
___La première secrétaire du PS utilise cette grille de lecture, déjà employée par Anthony Giddens, l'un des stratèges de Tony Blair, dans une tribune consacrée aux retraites et publiée dans Le Monde du 14 avril. Elle y explique qu'il faut "aller vers une société du soin" : "aucune allocation ne remplace les chaînes de soins, les solidarités familiales et amicales, l’attention du voisinage, l’engagement de la société tout entière. A ce prix, la réhumanisation de notre société prendra tout son sens", estime Martine Aubry...."

-Les mésaventures(et les malentendus)du "care" dans le débat politique français:
"... Le seul scénario retenu par toutes ces critiques(du care)reste celui de l'homme entrepreneur de lui-même, bien loin de toute notion de solidarité et de réciprocité.
Les éthiques du care ne reprennent pas cette option anthropologique, et récusent toute référence à une autonomie décontextualisée.
Leur urgence relève d'une compréhension fine de la réalité humaine et du monde comme interdépendance et vulnérabilité.
A l'heure de la globalisation, de l'ère numérique et d'une crise que beaucoup pensent structurelle, en appeler au care aujourd'hui n'est pas le fruit du hasard, mais participe d'un diagnostic du présent.
L'effet domino de la
crise financière
actuelle en Europe, les délocalisations qui engendrent chômage et précarité, les crises environnementales, les migrations internationales attestent d'une réalité où les vies sont de plus en plus liées les unes aux autres.Il en résulte de nouvelles épreuves sociales de désaffiliation, la contestation de modes de vie considérés comme allant de soi, l'extension de la population subalterne. Il en résulte aussi l'incapacité à imaginer un futur durable au profit de logiques financières à court terme.
Il reste que le care, s'il ne doit pas être la nouvelle formule magique de la gauche, peut être l'occasion de sa remise au travail selon les trois niveaux de la protection, du développement des capacités individuelles et de l'environnement...."

-Martine Aubry cherche à redynamiser la pensée sociale progressiste
-Martine Aubry veut mettre du care dans l’idéologie du Parti socialiste
-Qu'est-ce-que le "care" cher au PS?
-Politique du care contre société du soin
-
Je ne veux pas qu'on prenne soin de moi

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