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samedi 4 octobre 2008

Crise : comment en parler ?


Rhétorique de la crise. Les mots sont importants !

Bataille de mots au sommet.
S'agit-il d'une "croissance molle", "ralentie", "nulle" ou "négative ?
Pourquoi ces précautions oratoires? Pourquoi le mot "récession" est-il si redouté ? Plus qu'un embarras , une crainte de l'opinion, une dénégation, un voile jeté sur une réalité qu'on n'a pas voulu voir venir ?
Pensée magique qui veut conjurer la peur ? Certains pourtant n'hésitent pas à parler de "gouffre" (Fillon); pour provoquer peut être un effet de sidération dans l'opinion par un excès de dramatisation
Effet d'une réalité encore mal cernée ou panique réelle devant un imprévu (?) redouté par ses effets économiques et politiques prévisibles ?
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-"...
L'affolement, la confusion semblent avoir gagné jusqu'au sommet de l'Etat. Coup sur coup, il se voit contraint de reconnaître l'existence de deux faits qu'il a niés pendant des mois. Hier la crise, aujourd'hui la récession. La publication de la note de conjoncture de l'Insee, vendredi 3 octobre, ne laisse aucun doute à ce sujet: la récession économique est là et s'installe en France. Après un deuxième trimestre, où l'activité chutait de 0,3%, le troisième trimestre, selon les premiers calculs de l'Insee, s'inscrirait en recul de 0,1% et le quatrième de 0,1% aussi..."(MO-Mediapart)__________________

Récession : Sarkozy a promis "la vérité"... pas ses ministres:

La crise financière emporte tout, même les promesses du président de la République. Nicolas Sarkozy avait juré de dire « la vérité » aux Français. C'était lors du discours de Toulon, le 25 septembre:« On ne rétablira pas la confiance en mentant, on rétablira la confiance en disant la vérité. La vérité, les Français la veulent, et je suis persuadé qu'ils sont prêts à l’entendre. S’ils ont le sentiment à l'inverse qu’on leur cache des choses, alors le doute grandira. (...)Eric Woerth, ironise, face aux journalistes qui se pressaient vendredi à son arrivée au palais des Congrès d'Antibes:« La France est-elle entrée en récession ? Il ne faut pas jouer sur les mots, je trouve tout cela ridicule. Il y a une décroissance, une réduction de la croissance, une perte de croissance -je ne sais pas comment le dire- au troisième trimestre, c'est ça qui est important »...Christine Largarde est, elle, moins joueuse. Elle a balayé jeudi d'une phrase la polémique: « Ce n'est pas ça le plus important. » Mais a toutefois diffusé ce vendredi un communiqué, où elle prend soin de parler de croissance « légèrement négative au deuxième semestre 2008 » et de “mauvaise passe conjoncturelle qui reste temporaire”... Egalement pensionnaire de Bercy mais aussi porte-parole du gouvernement, Luc Chatel évoque de la même manière « une période très difficile avec un ralentissement de l'économie »Interrogé par France Inter, le député UMP Jean-Paul Charié explique pourquoi il vaut mieux parler de « croissance négative ». Quand son collègue Benoist Apparu en fait lui une question de politesse, assimilant la récession à un « gros mot ».

- Le mot récession fait peur et peut avoir de lourdes conséquences
-Le gouvernement parle de "croissance molle", pas de "récession":
"...Pour Xavier Bertrand, ministre du Travail, les Français ne s'intéressent pas aux mots. "Il faut tenir un discours de réalisme. Cette crise est grave, elle a des conséquences sur la croissance et sur le chômage. Mais un discours de réalisme, ce n'est pas un discours de catastrophisme."Jérôme Chartier, député UMP du Val d'Oise, résume la pensée commune des ministres et parlementaires UMP par un dernier exercice sémantique. "Je n'aime pas parler de récession, je préfère parler de croissance négative..."
-Trichet refuse de parler de ''récession'':"...Les experts de la BCE nous disent que nous avons une croissance ralentie, je ne prononcerai pas d'autre mot que cela; une croissance ralentie avec des risques importants que la croissance soit encore plus faible", a-t-il dit..."

-Juncker dit avoir pour les banquiers une considération "proche de zéro"... où l'on assiste à des renversements d'opinions stupéfiants!

1 commentaire:

Philippe Renève a dit…

Une bonne partie du discours ultralibéral, mais aussi de l’économie en général, sont basées sur la nécessité de croissance, de progrès, d’avancée.
« Mais qui n'avance pas recule
Comme dit Monsieur Dupneu
Un mec qui articule
Et qui est chef du contentieux »
(Brel, A jeun)
Il faut donc avancer, sous peine de tomber, comme le savent bien les cyclistes avisés (j’en connais ici).
La croissance a été ainsi sanctifiée, que dis-je, déifiée : moderne Baal, elle exige humilité des pauvres, rigueur et stoïcisme. Le peuple lui sacrifie avec joie liberté, égalité et fraternité, pour acheter plus d’écrans plats et de téléphones mobiles.
Alors venir parler tout soudain maintenant de récession serait aussi obscène que suicidaire…