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jeudi 3 avril 2014

Tri génétique: le risque

 La perfection par le tri?
                                            Le rêve de tous jeunes parents: un beau bébé
          Le fantasme de certains parents: un bébé parfait.
    Un bébé parfait, qui aurait en lui toutes les potentialités génétiques pour réussir au mieux dans la vie, sur tous les plans: individuels, scolaires, professionnels et sociaux, avec une santé sans failles de surcroît.
  Comme si la génétique déterminait le parcours individuel d'un sujet, comme si l'éducation, la culture, l'environnement en général, ne jouaient pas un rôle majeur dans la constitution et le parcours de ce qui fait l'humanité....
   La perfection (dont il faudrait d'abord définir les contours problématiques) ne fait pas partie d'un plan de vie, quelle qu'elle soit, mais dépend dans une large mesure des attentes sociales à un moment donné, en fonction des conditionnements imposés implicitement. Une vie réussie reste une thème de débats contradictoires et sans fin, culturellement et psychologiquement marqués. Un brillant trader à la City a-t-il une vie plus réussie qu'un agriculteur limousin?
     Toute naissance est déjà un risque en soi, un pari. Déjà biologiquement, des incertitudes existent. Nécessairement. Culturellement, impossible de planifier un destin, quel que soit le souhait des parents, souvent démenti.
 L'enfant parfait n'existe pas et les risques de la vie sont incontournables.
Le répéter aujourd'hui n'est pas toujours un truisme.
      Certes, on peut aujourd'hui parfois éviter une naissance à gros risques, compromettant une espérance de vie pleinement humaine, et éviter certaines naissances, par exemple celle d’enfants atteints de graves handicaps, comme la trisomie 21, la myopathie ou la mucoviscidose. Mais jusqu'où? Comment fixer l'anormalité humainement insoutenable?
      Le risque est grand d'aller plus loin, la recherche aidant, à grande vitesse: la traque au moindre défaut, seulement possible, peut engendrer le glissement progressif vers un eugénisme pervers et sans limite, comme on le voit déjà parfois aux USA, où l'achat de "bons" spermatozoïdes sur catalogue, à partir de donneurs bien sélectionnés, peut déboucher vers le "bébé à la carte" ...pour ceux qui en ont les moyens.
      Comme le signale le biologiste Jacques Testart, si on n'y prend garde,il n’y aura plus de limite au tri génétique si on ne met pas des garde-fous à l'envahissement du médical en matière de natalité.  C'est un eugénisme soft et consenti qui se préparerait.
               "Tests génétiques, sélection des embryons, multiplication des fécondations in vitro : jusqu’où ira la médicalisation de la procréation ? Avec la sélection des profils génétiques, « nous finirons par orienter l’espèce humaine en fonction d’impératifs économiques », prévient Jacques Testart, biologiste et « père » du premier bébé éprouvette. Dans son ouvrage Faire des enfants demain, le chercheur alerte sur les risques d’eugénisme qu’amènent ces démarches...
     Quand je parle du diagnostic pré-implantatoire comme vecteur d’eugénisme, je ne parle pas d’un eugénisme imposé par l’État et violent, comme il a pu l’être au début du XXème siècle aux États-Unis ou en Allemagne. Mais d’un eugénisme souhaité par les gens eux-mêmes, afin d’avoir une certaine garantie de la « qualité » du bébé. Certes, il y a déjà eu des tentations eugéniques auparavant. Et actuellement existe l’interruption médicale de grossesse (IMG), qui vise à interrompre une grossesse en cas de handicap du fœtus par exemple. Mais dans l’IMG, il y a le garde fou de la souffrance de l’avortement. Alors que le tri embryonnaire est une révolution : c’est la première fois qu’on peut choisir l’enfant de façon indolore par sélection au sein d’une population d’embryons ! On choisira juste de transférer un embryon « sain » dans l’utérus de la femme plutôt que les autres.
On ne peut plus nier son potentiel eugénique avec l’élimination d’embryons porteurs de handicaps aussi légers que le strabisme, en Angleterre. Ou de probabilités pathologiques plutôt que de certitudes, en France . Aux États-Unis, certaines cliniques proposent même de sélectionner le sexe et la couleur des yeux des bébés ! Dans les années 80, quand j’annonçais cette perspective de bébé sur mesure, les gens étaient horrifiés. Maintenant quand je le dénonce, je me fais engueuler...."
     La biologie de synthèse peut venir renforcer cette tendance de la part d' ingénieurs et de multinationales, qui veulent fabriquer la vie ou l'aménager à notre convenance. Sans fin assignable.
      On perçoit tous les risques de telles applications, comme le tri d'embryons dans le domaine de la vie humaine, même si certaines paraissent légitimes comme les  synthèses en cours de certains tissus humains de substitution, etc...
     Il faudra nécessairement renforcer les organes de surveillance éthique composés de spécialistes et de citoyens de tous horizons sociaux et idéologiques, pour mettre de la clarté, de l'ordre, de la mesure, du discernement, de la sagesse, non pas dans la recherche, mais dans certaines applications, pour  éviter notamment les risques de génétique de classe.
    Sinon, le glissement vers le mythe de " l'homme augmenté" et de toutes ses dérives, vers le fantasme du transhumanisme, pourrait produire le pire.
     La vie est inséparable du hasard, de la contingence, de l'incertitude, même si on peut la réduire de mieux en mieux.
    La volonté de maîtrise totale en ce domaine est un pulsion qu'il faut maîtriser, sous peine de graves désillusions.
Saurons-nous nous préserver du meilleur des mondes?..
    L' homme de demain.pourrait-il  être un cauchemar? 
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-Repris par Agoravox
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