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mercredi 27 janvier 2010

Une crise aussi civilisationnelle ?

Il n'y a pas que l'économie

-La crise économique dans laquelle nous sommes embarqués a été qualifiée de "crise globale": ses aspects ne sont pas seulement techniques (flux financiers) et gestionnaires (dérégulation généralisée)
C'est un phénomène "social total" (Mauss), qui touche les rouages économiques et leur lubrifiant monétaire, mais aussi chaque individu en tant qu'il est producteur, consommateur, épargnant.Le mode de consommation américain, moteur et effet de la production, par exemple, les stimulations d'achat sans cesse générées par un système banquaire déresponsabilisé et dérégulé, jouant sur les désirs humains conditionnés par une publicité efficace, est au coeur du système. Il est à la fois cause et effet.
L'appel à la jouissance et la frustration entretenue, sans cesse relancée, est la clé qui permet à la machine de fonctionner et de durer...jusqu'au blocage.Le crédit sans fin ni contrôle révèle vite ses limites.
Changer le système sera aussi changer notre rapport à nous-mêmes, aux autres (solidarité ou concurrence?), en retrouvant collectivement la maîtrise de nos besoins, de notre style de vie, de notre pouvoir sur les mécanismes et les institutions qui régulent notre vie en commun. Modifier notre rapport à l'argent et le fétichisme qu'il engendre ainsi que notre regard sur l'avenir de toute l'humanité, pour quitter les oeillères que donne l'excessif désir de consommation et l'individualisme qui en découle...Projet hautement politique au sens noble du terme.
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Castoriadis caractérisait « la société capitaliste (comme) une société qui court à l’abîme, à tout point de vue, car elle ne sait pas s’autolimiter ». Et d’enchaîner, « Or une société vraiment libre, une société autonome doit savoir s’autolimiter, savoir qu’il y a des choses qu’on ne peut pas faire ou qu’on ne doit pas faire ou qu’il ne faut même pas essayer de faire ou qu’il ne faut pas désirer »
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-Pourquoi l'économie mondiale ne s'est pas effondrée en 2009 ? - AgoraVox:
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...l’année 2009 a été exceptionnelle sur le plan de la compréhension de notre système économique. En effet, le fonctionnement réel de la bourse qui était obscur même pour la plupart des analystes s’est révélé au grand jour, un fonctionnement que l’on peut assimiler à celui d’un casino, une escroquerie planétaire.
Il faut bien comprendre que la bourse n’a qu’une seule utilité sociale, celle de fournir des capitaux aux entreprises. Or, c’est l’inverse qui se produit actuellement et c’est l’ensemble de la société qui est prise en otage et se dépouille de ses richesses au profit de quelques-uns. Les Etats-nations n’y survivront pas et se retrouveront ruinés eux aussi.

Tout d’abord, il faut savoir que 40 % de la création de "richesse" aux USA provient de la finance. Comment en est-on arrivé là ?
Philippe Béchade et François Leclerc, spécialistes de la finance, ont réalisé des analyses remarquables qui nous permettent d’y voir clair aujourd’hui.Philippe Béchade (chronique Agora) explique ainsi :"Pour ceux qui nourrissaient encore quelques doutes, le comportement robotique du marché prouve de façon éclatante qu’il n’existe plus aucun contre-pouvoir réel face aux machines. Les programmes de trading automatisés règlent avec une précision de géomètre l’angle de progression du canal ascendant. Une fois verrouillé le rythme de la hausse du sous-jacent (actions, indices, matières premières), un champ d’opportunités infinies s’ouvre aux opérateurs. Ils peuvent arbitrer en temps réel sur l’ensemble des catégories de dérivés : options, warrants, CFD, contrats sur indices."
François Leclerc (blog de Paul Jorion) pousse l’analyse encore plus loin :
"Ce débat, qui va rebondir, et les informations qu’il permet de recueillir, contribue à l’acquisition d’une vue d’ensemble, sous tous ses aspects, de la finance moderne. Celle-ci exerce désormais son activité de manière très sophistiquée et, de fait, souvent hors de tout contrôle possible des régulateurs, notamment en raison de son extrême complexité, de sa rapidité, et de ses interactions. Sauf à ce que des interdictions très strictes soient promulguées à la base même de son activité et qu’une surveillance sans complaisance ni relâche soit effectuée. Une démarche totalement à l’opposé de celle qui a été adoptée.Le high frequency trading n’est à cet égard que l’une des petites pièces du grand puzzle, pas encore totalement reconstitué mais qui prend déjà forme, du capitalisme financier d’aujourd’hui. L’image qui se dessine est celle d’une activité qui prétend n’obéir qu’à ses propres lois, s’affranchir de toutes les tutelles, s’imposer sans se soucier de ses conséquences dévastatrices et ne profiter au final qu’à une toute petite minorité, prenant sous sa coupe et en otage tous les autres. Prétendant exercer une forme d’asservissement moderne (au sens propre de la servitude), dont l’objectif est de régner en utilisant tous les leviers d’un contrôle social de plus en entêtant, omniprésent et sophistiqué. Non sans parvenir à une incontestable intériorisation de sa domination, la crise sociale montante étant l’occasion d’en mesurer l’intensité."
Pour faire simple, la finance, à l’aide des mathématiques financières a transformé la bourse en gigantesque casino. Plus grave encore, quelques-uns en sont devenus les maîtres.
Il faut savoir que ces algorithmes financiers extrêmement complexes sont détenus par peu d’acteurs. Ils permettent de tout savoir quelques secondes, voire dixièmes de seconde avant tout le monde et donc de gagner à tous les coups.Le système peut s’effondrer, ils feront donc toujours de l’argent en pariant à la baisse ou à la hausse avant tout le monde, jusqu’à ce que le système s’effondre totalement, ce qui aura lieu bientôt.Certains s’en sont rendus compte et se réfugient en achetant de l’or, pourtant, ce marché est lui aussi une vaste escroquerie car le monde de la finance est un milieu de requin qui n’hésite pas à parier contre ses propres clients, comme la banque HSBC gardienne des dépôts physiques du fonds d’investissement SPDR Gold Shares (GLD) et qui prend des options baissière sur l’or alors qu’elle revend des contrats investis sur ces fonds à ses clients. Ubuesque !J’ai d’ailleurs réalisé une étude complète sur ce sujet intitulée « L’or, nouvelle arnaque planétaire ? » que vous pouvez lire dans le magazine Nexus de janvier-février 2010.Le petit milieu de la grande finance fait donc ce qu’il veut, sans contrôles.
La reféodalisation du monde
_Le marché des produits dérivés continue de croître mais, de plus, est presque totalement verrouillé par 5 banques (JP Morgan Chase, Goldman Sachs, Bank Of America, Citibank, Wells Fargo) pour un montant dépassant les 200 000 milliards de dollars (on parle en trillions), c’est à dire près de 4 fois le PIB mondial.Vous pouvez trouver toutes les preuves (sources, graphiques) sur mon blog page 7, « Crise systémique : mythe et réalité ».La soi-disant théorie du jeu de l’offre et de la demande est donc une escroquerie intellectuelle comme l’ensemble de notre systémique économique qui repose sur un seul pilier : la loi du plus fort.
J. K. Galbraith économiste Canadien et conseiller des présidents Roosevelt et Kennedy avait d’ailleurs déclaré dans une interview publiée dans le Nouvel Observateur le 04 novembre 2005 que « L’économie de marché est volontiers décrite comme un héritage ancien. En l’occurrence, c’est une escroquerie."
D’ailleurs, les 20 personnes les plus riches du monde ont une fortune personnelle estimée en 2009 à 415 milliards de dollars soit un peu moins que le PIB de la Suisse (500 milliards de dollars) ! Source : Liste des milliardaires du monde en 2009.Les 1% les plus riches représentaient 10% du PIB en 1979 et 23% aujourd’hui. 53 % en 2039 ?
Albert Einstein, en mai 1949, dans un article paru dans la Monthly Review expliquait à l’époque : « Le résultat de ces développements est une oligarchie de capital privé dont le pouvoir exorbitant ne peut effectivement pas être contrôlé même par une société dont le système politique est démocratique. »

J’ai d’ailleurs démontré que notre système économique était structurellement irrécupérable à la page 8 de mon blog (Un système économique structurellement irrécupérable I). La volonté de liberté, l’anarco-capitalisme, a poussé à l’extrême l’idéal de liberté et c’est un échec car, comme l’affirme Alexandre Minkowski " La liberté, ce n’est pas la liberté de faire n’importe quoi, c’est le refus de faire ce qui est nuisible."
Nous sommes ainsi face à une situation inédite car nous avons 2 systèmes économiques qui nous conduisent tous in fine vers la dictature.Communisme et capitalisme sont en effet renvoyés dos à dos et il nous faut bâtir un nouveau modèle. Cependant, le problème est plus profond.Toutes les organisations sociales dépendent d’une loi mathématique fondamentale, la loi de Pareto ou plutôt, la loi de puissance qui prouve que dans n’importe quel système organisé, un petit nombre s’empare toujours de la quasi totalité des richesses au détriment des autres.La base de la domination est là et ceux qui contrôlent le monde connaissent parfaitement cette loi fondamentale dont ils usent et abusent.Le net, au fil des jours, lève le voile sur le fonctionnement de cette domination dont la clé est notre système de captation des richesses par un petit groupe, un fonctionnement économique moralement et mathématiquement condamné.
En effet, ce système conduit à tout transformer en exponentielle car la loi de Pareto (loi de puissance) est elle-même une exponentielle.
La loi universelle de l’équilibre et de l’harmonie (étudiée par tous les courants spirituels et par la science) résulte de l’analogie des contraires, le principe dialogique d’Edgar Morin qui a beaucoup emprunté à Eliphas Lévi et à la kabbale.Face à une exponentielle de capital accumulé dans les mains de quelques-uns, nous nous retrouvons donc (le principe d’équilibre) avec une exponentielle de dettes liée à une exponentielle de consommation et donc de destruction de la planète, de nous-mêmes.Cette loi de puissance est directement issue de notre cerveau primitif car au final, l’enseignement des fractales que l’on retrouve dans le principe « hologrammatique » d’Edgar Morin, démontre que la partie est dans le tout, mais le tout est dans la partie et que tout est inter relié. Nos systèmes économiques ne sont donc que les reflets de ce que nous sommes.
Vouloir bâtir un système plus juste et redistributif s’oppose donc à l’animal qui est en nous, car au final, nous sommes en guerre contre nous-mêmes. La solution face à la destruction de notre civilisation ne peut donc passer que par un changement individuel radical, une prise de conscience planétaire.
La réponse ne sera pas qu’économique donc, mais avant tout philosophique, spirituelle.
"Nous devons devenir le changement que nous souhaitons voir dans le monde__."
Mohandas Karamchand Gandhi __( Gilles Bonafi)

-Philippe Béchade » La Chronique Agora
-François Leclerc - Actualité
> L’actualité de la crise: la crise de société américaine:

"...La crise, en effet, n’est pas seulement économique et sociale, faite de saisies immobilières qui se poursuivent et d’un chômage qui s’installe, de la poursuite des faillites des banques régionales et des difficultés rencontrées par les PME pour obtenir des crédits, ou bien de la situation financière très tendue de grands Etats et de grandes métropoles. Aboutissant à une situation inédite : le pouvoir d’achat des classes moyennes, pris globalement, est durablement menacé, son financement par le crédit n’étant plus assuré, les déséquilibrant sans rémission.
La crise qui les atteint est aussi idéologique, mettant en cause ce qu’il était convenu de considérer être leurs valeurs, leur ciment, leur endoctrinement et croyance dans les vertus inégalables de la libre entreprise, de la concurrence et du libre exercice du marché, de la suprématie américaine. Une situation qui n’a eu comme précédent récent, mais moins dévastateur, que la contestation profonde de la guerre menée au Viet-Nam qui avait traversé la société toute entière, et qui pourrait même reléguer au second plan le grand traumatisme du 11 septembre, avec tout ce qu’il a déclenché et permis de changements profonds au sein de la société américaine.
___D’autant que des contradictions se développent au sein de l’administration, qui vont également jouer leur rôle, aux luttes d’influence se succédant des luttes de succession. Celle de Ben Bernanke pourrait donc se révéler ouverte, de même que celle de Tim Geithner, secrétaire au Trésor, qui va avoir beaucoup de mal à sortir du piège dans lequel il est tombé à propos du sauvetage de mégabanques via le renflouement d’AIG. Elisabeth Warren a certes peu de chances de prendre la direction de la future agence de protection des consommateurs, la création de celle-ci risquant de faire les frais d’un accord global avec les ténors du Sénat. Mais Sheila Bair, présidente du FDIC continue de faire campagne et se verrait toujours bien prendre la succession de Tim Geithner.
___Il est par ailleurs inévitable que des révélations sortent, à la faveur de telle ou telle audition devant les différentes commissions qui les multiplient, ou bien d’enquêtes journalistiques en cours, contribuant à déstabiliser les acteurs du sauvetage des mégabanques et de ses conditions scabreuses, alors que la situation économique et sociale pèse lourdement et que les mégabanques paradent, faisant preuve d’un étonnant manque de sens politique pour qui ne comprend pas le monde ferné dans lequel ses cadres vivent. Cette situation, à elle seule, est difficilement tenable si le sort des victimes de la crise ne s’améliore pas substantiellement, or cela n’en prend pas le chemin.."

-De la crise financière à la crise de civilisation:
"...L'organisation économique capitaliste pouvait à la rigueur se justifier (pour peu que n'entrent pas ici en considération les préoccupations de justice sociale) lorsque la machine industrielle avait à produire les biens et services vitaux pour les populations. Elle avait encore une raison d'être quand il se fut agi d'offrir un minimum de confort à ceux qui devenaient des consommateurs.____Mais les choses devinrent beaucoup plus critiques quand nous passâmes à la production du superflu, dans le seul but d'alimenter une machine qui ne souffrait pas de pause dans son mouvement vers l'avant. Un superflu si négatif qu'il assécha les ressources énergétiques de la planète et mit en péril nos conditions de vie.____Enfin, ces dernières années, cette course insensée franchit un pas décisif dans la folie. Le capitalisme, devenu désormais « financier », ne se préoccupait même plus de produire des biens et des services (pour la plupart devenus superflus comme on l'a vu), il fabriquait juste de l'argent.
___Lors des précédentes alertes, le capitalisme dut son salut à quelques guerres « opportunes » (1914, 1939). Toutes les infrastructures matérielles et même humaines (la Shoah) étant en ruines, il y avait tout à reconstruire.
____Nous avons dépassé les limites admissibles de ce développement
_Et puis nous n'avions pas alors atteint encore le stade ultime de notre développement. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. La formidable accélération des innovations technologiques nous a largement permis de franchir, et même de dangereusement excéder, les limites admissibles de ce développement. Sauf à disparaître, nous allons nécessairement devoir passer à un stade de gestion, de régulation de ce développement._____Dès lors, toute la raison d'être de l'organisation capitaliste, la croissance exponentielle, disparaît. Et une nouvelle guerre à l'échelle planétaire aboutirait plus sûrement à mettre en péril la survie de cette planète, qu'à fixer les bases dramatiques d'un nouveau départ.
____Quid des pays dits émergents et de tous ceux qui ont un si impérieux besoin de développement ? Les exemples de la Chine et de l'Inde montre comment le modèle capitaliste peut se révéler insupportablement désastreux en termes d'écologie et d'épuisement des ressources énergétiques. Si l'on ajoute que le développement de ces pays dépend étroitement de leurs exportations vers les pays occidentaux, on mesure l'impasse dans lequel ceux-ci vont rapidement se retrouver, et la nécessité d'inventer avec eux de nouveaux modèles de développement.____Voilà pourquoi, j'ai la conviction que nous assistons aujourd'hui au début d'un bouleversement comme il n'en existe pas un par siècle, une révolution majeure de civilisation qui restera plus tard dans l'histoire de l'humanité. Dans les mois qui viennent, ma machine économique capitaliste va s'enrayer et caler.
____De gré ou de force, nous devrons revoir nos modes de fonctionnement
_De gré ou de force, nous allons devoir faire face à une situation de chaos à laquelle nous devons d'ors et déjà nous préparer à faire face. De gré ou de force, nous allons être contraints de revoir tous nos modes de fonctionnement, toute notre organisation, de remettre en cause toute notre grille de compréhension du monde et ce qui faisait nos valeurs (comme le travail, par exemple).Nul ne sait par quelles péripéties douloureuses ou heureuses nous allons devoir désormais passer, ni combien de temps cette difficile période transitoire va durer, ni ce sur quoi nous allons déboucher (la propension naturelle des êtres humains à la dominance trouvera probablement encore à s'exprimer). Mais il semble tout à fait clair que notre monde capitaliste a vécu. L'effondrement financier en cours n'en est qu'un symptôme..."

-Crise écologique, énergétique et crise de civilisation sont étroitement liées
-L’irrationalité du capitalisme au cœur de la crise de civilisation planétaire
-Crise Economique Sociale Politique_-Castoriadis

-Sigmund Freud - malaise dans la civilisation
>Malaise dans la civilisation.
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_Crise: tempête en vue ?
-D'une crise à l'autre
-Dérives banquaires

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